« Lettre ouverte à Guy Parmelin »
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Lausanne, ce 5 mars 2021
Monsieur le Président
A votre initiative, les cloches ont sonné aujourd’hui pour marquer le premier décès dû à la pandémie dans notre pays.
Au nom de tous ceux et de toutes celles qui ont été, d’une façon ou d’une autre, impacté.e.s par la Covid depuis une année, nous vous remercions d’avoir balisé le début de ce temps chaotique par ce geste symbolique fort et national.
Cependant, si le 5 mars « fête » le début de la pandémie dans notre pays, il est indispensable d’en anticiper le terme. D’y réfléchir. D’annoncer dès maintenant une sortie de crise : un Jour de Deuil National.
Nous en avons besoin.
Nous ? Les familles, les proches, les ami.e.s, les privé.es de cérémonie, les endeuillé.e.s.
Mais aussi les professionnel.l.es de la santé, du social, du monde religieux, des Pompes Funèbres, celles et ceux dont le travail est mis en danger, les jeunes, les âgés.
Ce Jour de Deuil National est nécessaire pour plusieurs raisons :
– Pour honorer ceux et celles qui sont décédé.e.s de la pandémie ou pendant la pandémie. Donner une place aux défunt.e.s afin d’éviter qu’ils.elles prennent toute la place, comme l’évoque Vinciane Despret
– Pour mettre un terme au temps suspendu et inaugurer le temps d’après selon les réflexions d’Alix Noble Burnand, cela permet de tourner la page à l’image de la cérémonie de deuil fédérale après le tsunami
– Pour éviter la multiplication d’initiatives de toutes sortes, d’autant plus nombreuses que l’Etat ne prend pas ses responsabilités, comme en France. Elles n’ont pas la force d’un symbole commun d’ampleur national et ne suffisent pas.
L’organisation de ce Jour de Deuil National se heurte certes au défi de la temporalité. Plusieurs pays l’ont fait trop tôt.
Un jour de deuil national ne peut pas se faire en pleine 2e ou 3e vague. Cependant, prévoir la date et l’annoncer d’ores et déjà, c’est poser un signe fort de l’engagement de l’Etat, de nature à contenir l’angoisse et à rassurer.
Si la pandémie dure encore, la date peut être repoussée.
On peut aussi faire le choix d’une date déjà inscrite dans la symbolique culturelle. (Pourquoi pas en novembre, en période de Toussaint ? Une date plus signifiante que le 27 décembre prévu par l’OMS).
Cette proposition qui vous est faite, Monsieur le Président, est le résultat de réflexions que nous menons au sein de l’association Deuil’S depuis le début 2021. Cette association rassemble un groupe de professionnel.le.s de terrain qui travaillent dans le champ de la mort et du deuil, dans le canton de Vaud.
Après avoir contacté et travaillé avec des représentant.e.s des Eglises (l’EERV et l’Eglise catholique), nous sommes partis dans un premier temps sur la piste d’une cérémonie locale, avant de comprendre qu’il fallait un événement d’ampleur nationale.
Nous souhaitons porter ce projet sur la place publique.
Nous vous remercions de l’intérêt que vous porterez à notre demande, et vous prions d’agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos sentiments distingués.
Alix N. Burnand
Directrice culturelle de Deuil’S
La Toussaint
Grecs, Romains, Celtes (comme toutes les traditions) ont célébré leurs défunts lors de jours du souvenir. L’Eglise catholique a récupéré la fête païenne des morts en l’an 800, en la christianisant et en initiant un culte des Saints, le 1er novembre (date de la fête celte de Samain). Mais ce fut un échec, le culte des morts restant vivace. « C’est probablement l’échec de cette tentative qui amena à admettre, accolée à la Toussaint, une fête des morts le 2 novembre. »
(Philippe Besnard Mœurs et humeurs des Français au fil des aisons, Paris Balland 1989)
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